Aujourd’hui je vous invite à un entretien avec Stéphanie Soufflet, psychothérapeute, spécialisée dans les thérapies brèves et la respiration holotropique.
Stéphanie, je suis très heureuse de te recevoir !
On s’est rencontrées dans le cadre d’un groupe de femmes d’entrepreneures, et qui me motive à mener cet ITW avec toi, c’est la richesse de ton parcours étonnant, et qui pourtant a un fil rouge, malgré les différentes carrières que tu as menées.
Peux tu te présenter ?
Bonjour Elise, merci de l’intérêt que mon parcours suscite en toi.
Ta question vient toucher exactement ce qui est l’essence de mon parcours.
À qui demandes-tu cette présentation ?
Quelle part de moi va-t-elle répondre ?
Derrière « Je Suis… », il y a bien plus que ce que les mots peuvent décrire.
Et c’est tout le paradoxe auquel je suis confrontée quand je dois me présenter.
Quelle définition de moi est attendue ?
Un titre ?
Une image ?
Je dirais que je suis Stéphanie et que depuis ma venue au monde, j’ai essayé de répondre à la question de ce que l’on appelle tous l’Amour. Je le sens, c’est la question qui m’habite depuis aussi longtemps que je m’en souvienne.
Alors je dirais que je suis une exploratrice de l’Amour. Et que tout est prétexte à le chercher, à le sentir, à le vivre. Et qu’il y a l’idéal d’où je suis partie pour le chercher et il y a l’expérience à incarner.
Mon parcours n’a donc d’intérêt que s’il est regardé à travers cette question existentielle qui meut chaque choix, chaque étape. Et ce parcours est emprunté par une femme, moi, avec l’expérimentation sur divers continents, dans diverses organisations, divers positions professionnelles, humaines, mais que le fil rouge, c’est elle et sa quête.
Et depuis l’âge de 17 ans, j’ai animé et accompagné des groupes. Aujourd’hui, j’accompagne les personnes en quête de leur essence profonde dans des ateliers, des retraites, des voyages intérieurs en extérieur, ici en Belgique ou à l’étranger.
J’interviens en France, et depuis 2013, j’ai accompagné mes clients dans des parcours spirituels en Égypte, en Jordanie, et en Israël.
J’ai compris que tu as eu plusieurs expériences de carrières à l’étranger, quelles étaient tes missions ?
Oui, je suis partie en Afrique où j’ai été professeure et animatrice radio, puis observateur et gestionnaire d’un centre de santé pour une ONG. J’ai participé à la création du Bureau International de Médecins sans frontières à Bruxelles, il s’agissait de créer un bureau de coordination des sections opérationnelles de l’ONG, ai été engagée pour créer AXA Atout Cœur Belgique par le Groupe AXA et ai continué en tant que chargée de projets dans une agence gouvernementale luxembourgeoise.
Toutes ces expériences professionnelles m’ont permis d’observer le monde, les cultures, les modes relationnels. Observer les relations humaines, les enjeux, l’impact des différences culturelles et historiques, m’ont permis de voir en direct ce que les livres de sociologies, philosophies, psychogénéalogie, psychologie, etc. décrivent.
Observer mes perceptions, mes émotions, les réactions de mon corps dans certaines situations, m’ont permis de mieux me connaître et de comprendre que je cherchais à me définir, à appartenir à un groupe dans lequel j’aurais une identité.
Je sais que mon identité ne dépend pas de ma capacité d’adaptation pour correspondre aux attentes supposées de l’extérieur. Mais au contraire de ma capacité à aimer et à m’aimer.
Ce qui m’a forgée, c’est surtout de comprendre le monde au travers des expériences qui font mal. Nous vivons des expériences dures, voire dramatiques qui nous transforment à jamais.
Aujourd’hui j’ai de plus en plus envie de partager autour de la thérapie de l’Amour.
Mais un Amour vivant, loin de l’idéal éthéré et violent qui nous divise finalement. Et cette capacité d’aimer se manifeste surtout quand on vit avec l’autre, les autres, qui ne correspondent pas à nos attentes. Ils nous empêchent de rester dans l’illusion que nous avons la vérité, que nous savons mieux que les autres comment devrait tourner le monde en général, notre monde personnel en particulier.
Comment te positionnes-tu pour transmettre ? Tu écris en tant que psychothérapeute ?
J’ai pris pratiquement 1 an sabbatique quant à l’animation de groupe.
Après la pandémie et toutes les questions existentielles qu’elle a posé à notre humanité, j’avais besoin de savoir comment me positionner dans le monde d’après.
Car reprendre exactement comme avant ne me semblait pas juste.
Trop de manifestations de violence, de rébellion quel que soit le sens qu’elle prenait, de rejet de l’autre, de division entre les familles, les couples, les institutions m’ont amenées à regarder pourquoi les magnifiques phrases brandies sur les réseaux ou sur les ondes ne portaient pas de fruits.
Je me suis demandée si l’essor du développement personnel n’avait pas conduit à créer une doxa du politiquement correct du « la bonne voie c’est ça » et cautionner ainsi le rejet de tout ce qui dérange.
Et ainsi rater la cible. Avoir accompagné à changer de costume plutôt que de s’être déshabillé pour advenir de Soi.
Aujourd’hui, je reprends mes activités d’accompagnement de groupe, à côté de l’accompagnement transpersonnel individuel.
J’ai fait le point en moi et construit un cadre que je souhaite plus clair pour comprendre que le chemin de l’Amour est le chemin sinueux, qui n’est pas une ligne droite, qu’il est semé d’embuches et nécessite persévérance, honnêteté, humilité et engagement.
Mon plus grand outil, transmis par Françoise Muhr, c’est la bienveillance sans complaisance.
Aujourd’hui, j’aimerais partager à partir de mon humanité. Je n’ai pas la vérité, mais un petit bout à partir de mon existence personnelle et mes compréhensions.
Je n’ai pas de méthode si ce n’est la richesse des textes sacrés, Tao Te King, Torah, Bible, Coran, apocryphes, etc et la gratitude vis à vis de ceux qui ont écrit et me permettent de prendre du recul au delà de mes 49 ans pour prendre de la hauteur, regarder les lignes ontologiques que je crois qu’il est nécessaire d’appliquer individuellement. Unir les vérités supra et collective individuellement. Je crois que c’est à cet endroit que se trouve le point d’union de la dualité.
Quelle est ta motivation dans tes accompagnements ?
Je ne vois pas l’accompagnement comme magique par l’utilisation d’outils et hop, le travail est fait. Les outils sont au service de l’engagement de celui qui poursuit la quête de lui-même.
Avant tout, la puissance du lien entre le thérapeute et le client va permettre ce retour à soi pas à pas, au rythme des défenses qui se manifesteront, se dévoileront et des choix à poser à chaque étape : se reposer, s’arrêter un long moment, reprendre ou marcher en continu.
Et mon outil principal est l’Amour. J’aime les personnes que j’accompagne. Et je ne confonds pas l’affection avec l’Amour. Nous ne sommes pas amis ou adversaire, mais nous pouvons nous aimer. Aimer le monde tel qu’il est, c’est le chemin de possible transformations si elles sont justes pour l’équilibre. Car osons regarder que vouloir changer le monde, c’est comme prendre le pouvoir et décider qu’à partir du simple recul de notre propre parcours de vie, nous en savons plus que ce que l’histoire de notre espèce nous enseigne, que nous sommes au dessus de tout par notre simple perception personnelle. N’est-ce pas le summum de l’orgueil ?
Ce qui m’interpelle c’est ton côté très scientifique et sans ce côté évaporé que l’on peut retrouver dans le développement personnel
Merci pour cette question qui me fait sourire.
J’aime l’idée qu’apparaisse un côté scientifique quand je parle de mon travail et de mon approche. Je pense qu’étant hyper-intuitive, je me dois d’équilibrer en confrontant mon intuition à la matière. Et je suis heureuse d’entendre que cela me distingue à tes yeux de ce que tu trouves dans le développement personnel.
Il est vrai que lorsqu’on anime des groupes, on se trouve dans le champ du développement personnel. Et pourtant, je n’aime pas ce terme.
En effet, c’est à partir de l’accompagnement personnel et individuel que j’ai élaboré la structure des ateliers, stages, voyage-retraites que j’ai mis en place depuis maintenant plus de 10 ans.
J’ai souhaité proposer une étape de plus dans le cheminement individuel des clients que j’accompagne. Je m’étais rendue compte d’un vide entre le moment protégé des prises de conscience et la possibilité de l’éprouver dans le réel dans un espace sécurisé.
Les études sur les groupes ont montré qu’au delà et en deçà d’un certain nombre de personnes, le groupe illustre une représentation simplifiée mais réelle du monde. C’est donc l’occasion de pouvoir oser le pas de plus, en sécurité compte tenu du cadre posé, et de prendre le risque identitaire nécessaire à la transformation individuelle.
Je fais pour ma part le choix de travailler majoritairement avec de petits groupes. Cela me permet une observation plus affuté. Et cela aide à accompagner l’intégration avec plus d’efficience. C’est l’inverse pour les groupes d’apprentissage où la multiplicité me permet d’élargir le champ des idées.
Finalement on en revient à l’amour inconditionnel ?
Il me semble que la société confond l’amour affectif et l’amour inconditionnel. Mon côté provocateur aime bien venir titiller ce point à partir d’une phrase tiré des évangiles et dites par Jésus : « Aimer ses ennemis ».
Je ne sais pas toi, mais moi, je trouve cette phrase totalement incroyable. Sur le plan mental, soyons honnête, cette phrase ne peut pas se comprendre. Et pourtant, elle est simple si on ne confond pas les niveaux affectif et inconditionnel. Aimer ne veut pas dire être amis.
Lors de mes ateliers, les participants l’entendent dés l’introduction: « Vous ne serez probablement pas amis, mais vous allez vous aimer ». Et c’est du réel, du concret. Par exemple, lors d’un atelier de Respiration Holotropique, l’expérience dure entre 2 et 3 heures et s’effectue en binôme.
Durant l’expérience, l’accompagnant va offrir 2 heures de son temps en totalement présence et écoute de l’autre. Cet inconnu en début de journée. Cet inconnu finalement dont il ne sait rien car lors d’une journée, les participants sont là pour vivre l’expérience qui sera intégrée ensuite en séance individuelle avec moi ou avec le thérapeute du participant.
L’équilibre sera parfait puisqu’il s’agit d’un échange équivalent car sur la journée, les deux positions sont prévus pour chaque participants. Plus on se donne, plus on reçoit. Encore une petite phrase tiré des évangiles « donnez et vous recevrez au centuple ». Que de lois ontologiques perdues pour l’humanité en rejetant les textes en même temps que l’institution ! Que de confusions entre le patrimoine de l’humanité, selon moi, contenu dans ces textes et ce que les différentes institutions religieuses en ont fait.
Alors, il y a mon métier, mes stages, mes ateliers, …. Et il y a aussi ce que je peux transmettre et offrir gratuitement. Pour moi, c’est à travers le don reçu par Olivier Clerc et qu’il a su offrir à son tour : Les Cercles de Pardon.
À travers ce processus, j’ai l’opportunité de contribuer à l’émergence d’une nouvelle compréhension du Par Don et par voie de conséquence de recevoir une meilleure reconnaissance de mon droit à l’erreur. Je ne développerai pas ici ce lien de causalité qui demanderait un article en soi.
Tu parles d’écrire, c’est pour des articles ? Tu m’as évoqué le fait d’écrire pour une Encyclopédie ?
Oui, je me sens poussée depuis longtemps déjà à oser proposer des histoires symboliques pour partager autour de concepts théoriques, philosophiques et culturels ; j’ai l’envie de les rendre plus accessibles à travers des images et un voyage à travers les métaphores. Redonner le goût de la différence en la ré-apprivoisant.
J’ai aussi la chance d’avoir un compagnon de vie qui est physicien, ce qui me permet aussi de regarder encore mes façons d’interpréter les choses, il m’apporte une relecture et des contradictions, des questionnements ; ce qui nous fait bouger, entre sa vision scientifique, un peu dure et fondamentaliste, et ma relativité où la part émotionnelle agit comme un voile parfois. Et son regard sur mes métaphores, les débats parfois entre nous, les échanges sur nos visions très différentes, viennent enrichir l’écriture.
Je suis perplexe depuis quelques années en observant l’évolution du journalisme, le développement du ciblage publicitaire et informatif, l’orgie de communication en tout sens, qui contribuent à radicaliser la pensée.
L’espace contradictoire ou même le questionnement qui ouvre vers de nouvelles perspectives est de plus en plus faible, laissant place à la division et la dualité de plus en plus marquée dans la société, mais aussi dans les familles, les entreprises, les écoles…
J’entends même qu’on veut sortir de la dualité. Qu’il faut lutter contre elle. N’est-ce pas en luttant contre la dualité que nous créons la dualité ? N’est-ce pas le propre de l’homme que d’être duel : ombre et lumière ? N’aurions-nous pas plus de bien-être à chercher la partie trinitaire de nous, celle qui unit les deux parts de nous pour ne faire qu’un ?
Alors oui, je te parle d’un projet d’encyclopédie en cours. Je trouve cela passionnant d’aller à contre-courant et de penser à coucher dans la matière la connaissance qui n’est plus que volatile sur le web, disparaissant au fil du temps.
Qui prend encore le temps d’aller feuilleter les pages des connaissances transmises par nos lignées proches ou lointaines et laissées dans les encyclopédies ?
À une époque où le physicien et le philosophe pouvaient être la même personne, ou le médecin et magnétiseur pouvaient travailler ensemble, reconnaissant humblement que l’un apporte ce que l’autre ne pouvait pas, soucieux seulement de soigner la personne malade…
Alors j’aime l’idée folle de faire un travail de fond et de se frotter à inscrire dans une encyclopédie, le niveau de connaissance de notre humanité actuelle et de laisser une trace écrite et honnête de notre niveau de connaissances. Car n’oublions pas que nous jugeons nous aussi ce que nos ancêtres nous ont laissés. Et oser nommer ce travail encyclopédie, c’est prendre le risque que les générations futures jugent notre niveau de conscience, de croyances, de connaissances… sommes-nous conscients d’une telle responsabilité ?
Pas tout le temps.
Est-ce que tu prévois une présence sur le web ?
J’ai le désir d’écrire des articles de fond pour mon site internet. De contribuer à travers les réseaux sociaux. J’avance doucement vers ce type de communication qui m’est étranger jusqu’à maintenant.
Cela prend du temps et je souhaite rester à l’équilibre en osant publier plus largement mes recherches et propositions de réflexions sur le monde, la vie, l’humain… sans que ce soit au détriment de l’accompagnement relationnel individuel et collectif.
Je suis vigilante aussi, car je sais combien se faire comprendre de la bonne façon est difficile.
Écrire et partager c’est prendre le risque identitaire nécessaire pour prendre sa place.
Et puisque je me vois comme une accompagnante à révéler l’être, il est temps que le mien ose se révéler où je suis invitée à le faire. C’est mon passage dans le grand groupe de l’humanité après l’avoir exercé depuis plus de 10 ans dans l’intimité de mes groupes locaux.
Pour contacter Stéphanie :
unsoufflesain@stephanie-soufflet.eu
www.stephanie-soufflet.eu (en cours de construction)